Tanzanie – Zanzibar – Le vieil homme et la mer

A la gare routière de Zanzibar Town, je cherche le dala-dala (minibus public) pour Paje, village situé à deux heures de route au sud-est de l’île. Le bus est en fait une camionnette qui transporte sur son pont arrière jusqu’à une vingtaine de passagers.

Le vieil homme voyageur

Je grimpe dans le dala-dala qui compte alors pour unique passager un vieil homme à l’apparence fatiguée. Son esprit s’avive à notre rencontre. Il veut tout savoir sur mon origine, ma situation, ma destination. S’étonne de mon séjour au Pakistan (un de plus). Paraît aussi flatté que des étrangers partagent son moyen de locomotion. Puis son intérêt retombe avec la torpeur ambiante. Entre-temps, les banquettes se sont garnies de leurs grappes de passagers. Le chauffeur démarre. A Paje, le vieil homme descend comme moi et disparaît sans mot dire.

La découverte de la plage me laisse pantois d’admiration: « waouh! ». L’océan Indien a tressé autour d’une partie du littoral de Zanzibar une guirlande corallienne à la façon tahitienne. A Paje, les récifs retiennent un large lit de sable fin comme la poussière qui se dénude presque à marée basse. Le soleil, le vent et les vagues sculptent de doux et mous reliefs sablonneux. Les coloris sont sublimes, tantôt d’un pur azur, tantôt en subtils dégradés de bleu, vert et crème.

Le lendemain, je retrouve sur la plage notre vieil homme. Son pas lent trahit une vie éprouvante. Il recueille patiemment des algues rejetées sur la plage par la marée haute. Nos retrouvailles sont étonnamment chaleureuses.

Le vieil homme et la mer

L’homme se fait volubile. Il aurait pu s’appeler Santiago, le personnage central du Vieil homme et la mer, roman écrit par Ernest Hemingway en 1952 à Cuba. Notre Santiago est pêcheur lui aussi, lui aussi fatigué et souvent malchanceux dans l’exercice de son art périlleux et aléatoire. Les yeux usés à force de scruter les eaux qui décuplent la luminosité ambiante, il se contente désormais de glaner les maigres ressources maritimes de la frange corallienne.

Dans ses derniers mois de pêche en mer, Santiago ramenait des prises toujours plus menues qui alimentaient moins sa famille que les railleries de ses collègues et de ses proches, dont la pêche restait abondante.

A l’identique du personnage d’Hemingway, notre Santiago entreprend alors un baroud d’honneur pour démontrer au village ses compétences et sa résilience.

Santiago dompte à la force du poignet un énorme marlin qu’il arrime à sa pirogue. Comme le héros malheureux d’Hemingway, notre Santiago lutte de toutes ses forces contre les requins attirés par le sang de sa prise. Ceux-ci dévorent le marlin.

La carcasse du poisson que Santiago, épuisé, ramena au port atteste toutefois de la taille de la prise et de la dureté du combat mené par le vieux pêcheur. Toujours aussi pauvre mais riche d’une fierté professionnelle renouvelée, Santiago prend alors sa retraite.  Le vieux dhow de Santiago, cette pirogue à balanciers d’origine arabe, se délecte à présent d’un repos bien mérité.

Le village de Santiago dépend à présent moins des ressources halieutiques et davantage de revenus touristiques. A leur temps perdu, les villageoises se prennent désormais à descendre élégamment leurs Champs Elysées sablonneux.

Danse masai

En corollaire apparaissent des gens peu familiarisés avec le milieu marin mais appréciant son voisinage. Les Masai transposent leurs compétences ancestrales dans le gardiennage des lieux touristiques. Les touristes s’adonnent à toutes sortes d’activités de villégiature. Essayez la danse masai lors de vos prochaines vacances!

Bien à Vous,

By Bertrand

Trotting the globe with vision, values and humour